Après un premier projet de programme proposé aux organisations syndicales et aux enseignants d'EPS, la Degesco a présenté une nouvelle mouture mi-décembre. Les simplifications étaient grandes. Pour le Sgen-CFDT, c'est au final un texte appauvri qui a été validé au Conseil Supérieur de l'Éducation.
Mi-novembre : Un premier projet des programme d’EPS est proposé et débattu avec les Inspecteurs généraux
Ce premier projet rendait compte de finalités et d’objectifs ambitieux pour l’EPS.
Le Sgen-CFDT soulignait une avancée sur la place de l’élève acteur. La notion d’expérience renforçait cette vision, ainsi que l’amorce de pistes induisant une prise de distance avec la seule entrée performative pour penser l’engagement de l’élève.
Nous avions également fait, par écrit et oralement, plusieurs propositions pour clarifier et faire avancer ces programmes.
Le Sgen-CFDT rappelait en outre la nécessité de penser la formation des enseignants, les installations, le nombre d’élèves par groupe, le nombre d’heure d’EPS par semaine. Nous évoquions aussi l’enjeu des évaluations déterminantes pour la mise en œuvre des programmes.
Pour en savoir plus : Programmes d’EPS au lycée : ce que porte le Sgen-CFDT
Jeudi 13 décembre : une nouvelle proposition, revue par la Dgesco, est soumise aux organisations syndicales.
La proposition de novembre est largement revue. Nombres de paragraphes ont été supprimés ou fortement allégés. La Degesco justifie ces modifications par des demandes de simplifications de la part de la profession.
Pour ceux qui s’intéressent à ces étapes, nous faisons ici le point sur ces changements :
Un allégement qui retire certains concepts intéressants aux yeux du Sgen-CFDT
La notion de pratique physique, sportive et artistique est remplacée par la forme plus classique d’APSA
La notion d’Activité physique, sportive et artistique – APSA n’implique pas la pratique de l’élève, mais en reste à l’activité support. Au Sgen-CFDT, nous savons bien que les enjeux dépassent le vocabulaire. Ce terme de pratique était un marqueur parmi d’autres pour affirmer l’engagement de l’élève, son expérience vécue, comme point central de notre discipline.
Le paragraphe sur l’apprentissage spiralaire est retiré.
La proposition de programme commun pour tout le lycée, laisse imaginer la nécessité de penser les apprentissages comme autre chose qu’une accumulation de savoirs et connaissances sériés année par année. Cette proposition de cycle est un point positif qui n’est pas présent dans toutes les disciplines, loin de là. Spécifier la notion d’apprentissage spiralaire, était là aussi, un marqueur de plus pour affirmer les processus d’apprentissages mis en jeu. La notion a disparu.
La notion d’expérience corporelle est retirée. Le concept de champ d’apprentissage est introduit.
Dans la version initiale, la notion d’expérience désignait « la façon dont l’élève engage et met à l’épreuve son corps pour effectuer une pratique ». Elle a été supprimée en tant que base de cadrage des programmes et de classification. On parle à présent « d’engagement dans des APSA organisées en champs d’apprentissage ».
Cela n’est pas neutre. Il y a certes une volonté de continuité avec la matrice du collège. Mais ce changement laisse aussi à penser que l’on revient à une logique d’apprentissages qui part plus des APSA que des expériences de l’élève.
On retrouve cette bascule dans une phrase qui introduit la « liste des APSA » : « Ces formes scolaires de pratiques restent porteuses du fond culturel des APSA contemporaines ». Mais la notion de fond culturel, bien travaillée par d’autres expert (groupe CEDREPS) n’est pas développée.
Nous aurions été favorables à la proposition de l’AEEPS qui demandait au contraire de spécifier : « l’enseignant peut prendre des distances avec les pratiques sociales pour l’adapter au public…« .
La proposition actuelle n’interdit nullement cette posture, et ne retire pas la notion d’expérience de l’ensemble du programme. C’est bien sur l’articulation expérience / APSA que les équipes vont devoir réfléchir…
Notons qu’aucun de ces points de modification n’avait été soulevé lors du débat entre organisations syndicales au mois de novembre….
Le Yoga était retiré de la liste des APSA (nationale) du dernier « champ d’apprentissage » .
Après une demande unanime des organisations syndicales, cette activité réapparaîtra dans la version finale.
Cette pratique, dont la définition dans le premier projet méritait d’être revue, était cependant une porte vers de nouvelles formes d’engagement. Pour le Sgen-CFDT, cette forme d’engagement ne se réfère pas directement à la logique « d’entraînement, et de développement de ressources » telle que décrite pour le cinquième champ d’apprentissage actuel. Il y aurait sans doute d’autres formes d’expérience à définir.
On offre en tous les cas ici l’opportunité de formaliser comme essentiel dans le parcours de l’élève, une engagement singulier. Une expérience susceptible de développer « le moins, le mieux, l’harmonie »… plutôt que « la puissance, l’entraînement, la maîtrise, le contrôle »…
Le maintien du terme s’entraîner, plusieurs fois répété va dans le même sens, plutôt que pratiquer, s’exercer.. On reste avec un but à atteindre clair… plutôt que de vivre le chemin !
Encore une fois, ces points de formulation ne sont que des mots qui dessinent une certaine vision, visée éducative… Si nous aurions préféré que d’autres marqueurs invitent plus clairement à d’autres visées, il n’en reste pas moins que les enseignants restent responsables du traitement didactique de leurs enseignements. Nous faisons confiance aux équipes !
D’autres points du programme qui, eux, n’ont pas bougé malgré les demandes du Sgen-CFDT :
- Les activités artistiques restent dans le même champ d’apprentissage que la gym sportive etc… Ce qui, selon nous, ne permet pas de réellement mettre en avant l’engagement dans un processus de création artistique.
- Notre proposition de poser comme contrainte au moins une activité collective dans le cursus n’a pas été retenue. Certes, dans les objectifs généraux et dans chaque attendu de fin de cycle, les notions de coopération, de rôles etc. sont mentionnées. C’est un point important mais qui ne remplace pas un engagement moteur dans une pratique collective.
- La matrice disciplinaire propose : un attendu de fin de lycée (AFL) par champs d’apprentissage et des « éléments prioritaires » pour atteindre ces AFL. Ces éléments apportent certes quelques éléments de contenu, mais ne ils ne rendent pas compte d’indications sur les thèmes d’étude réels à travailler au lycée (demande du Sgen-CFDT). Entre de grands objectifs peu ou pas spécifiés et des contenus normatifs et hypers contraignants… Il nous semble que ce sont les équipes qui seront les plus à mêmes de construire les attendus de fin de cycle les plus pertinents pour leur public. Attendons les documents ressources peut-être.
- Le programme de l’option a été quelque peu allégé, mais sa faisabilité reste en question. Ce programme optionnel est-il possible à mener en terme de temps et de moyens …? La demande de création d’une spécialité, unanimement demandée par les organisations syndicales n’a pas été retenue.
- Nos demandes spécifiques relatives aux moyens de mise en œuvre des programmes n’ont pas été abordées. La notion de formation des enseignants devra pourtant être au coeur des préoccupations du ministère.
Les enjeux des évaluations ne faisaient pas l’objet de cette commission. En lien avec les AFL, ils ne devront pas être oubliés
En restant dans une approche par APSA, avec des contenus très larges, ce sont encore une fois les évaluations qui guideront les pratiques enseignantes, et donc les apprentissages des élèves.
Une entrée par l’expérience de l’élève, avec des thèmes de travail identifiés par type d’expérience, que demandait le Sgen-CFDT aurait peut-être permis de réfléchir différemment aux modalités d’évaluation de ces formes d’engagement.
Le Sgen-CFDT espère éviter des épreuves fermées qui induisent du bachotage sur des formes de pratiques restreintes.
Ce qui a été amélioré dans ces programmes EPS :
- « Le savoir se préparer et s’entraîner… » est remis comme un objectif général. On y gagne en lisibilité.
- En seconde, il est précisé que les lycéens doivent passer par un processus de création artistique et non plus l’obligation de programmer telle ou telle activité (notamment la danse).
- Dans ces AFL, figure, un attendu moteur, un attendu relatif à l’entraînement, un autre sur la coopération ou les rôles.
- Le projet EPS ne doit plus être présenté au Conseil d’Administration comme le spécifiait le premier texte. Il reste un outil pédagogique, susceptible d’être présenté aux différents acteurs.
- Dans les mission de l’Association Sportive, est retirée l’idée que celle-ci doive prendre en charge le rattrapage du savoir nager.
Suite à ces modifications, le Sgen-CFDT a réitéré des amendements.
Le Sgen-CFDT s’est prononcé contre ces programmes en Conseil supérieur de l’éducation – CSE. Nous dénonçons à la fois des propositions appauvries, n’encourageant pas réellement une évolution de notre discipline, et des modalités de consultation des partenaires non respectueuses du travail de chacun.
Restons acteurs de notre métier, et proposons, à toutes les échelles de faire évoluer notre discipline dans une dynamique de recherche d’épanouissement des élèves.
Ressources :