Épreuves communes de contrôle continu (E3C) au lycée : l’usine à gaz se construit, mais à quel prix ?

Le ministère vient de communiquer (enfin !) sur les nouvelles épreuves communes de contrôle continu du lycée (E3C dans le nouveau jargon). Vous les trouverez détaillées ci-dessous et vous verrez aussi pourquoi, pour le Sgen-CFDT, la principale question en suspens est la rémunération.

Les E3C, qu’est-ce à dire ?

Il s’agit, dans l’usine à gaz qu’est le nouveau bac 2021, des épreuves que passent les élèves  :

  • en première d’abord entre janvier et février pour l’histoire-géographie, les langues vivantes A et B et, pour la voie technologique, les mathématiques.

  • en première toujours entre la mi-avril et la fin-mai : les mêmes disciplines plus l’enseignement de spécialité abandonné par les élèves et l’enseignement scientifique de la voie générale.

  • en terminale d’avril à juin pour les mêmes matières qu’en première : l’histoire-géographie, les langues vivantes A et B, l’enseignement scientifique pour la voie générale et, pour la voie technologique, les mathématiques.

Chaque épreuve dure deux heures, sauf pour les langues vivantes.

Le tout pour 30 % de la note finale du bac. Le Sgen-CFDT revendique une simplification de ce bac fourre-tout, illisible et synonyme de bachotage permanent, par exemple en supprimant ces E3C.

Vous êtes en retard, Monsieur le ministre !

Le texte du ministère est bien trop tardif : il paraît à la mi-octobre, ce qui signifie six semaines de brouillard après la rentrée pour les collègues et les élèves et moins de trois mois (et encore il faudrait décompter les vacances) avant les épreuves ! Heureusement que, souvent, les enseignants n’ont pas attendu pour harmoniser les progressions pédagogiques !

Sujets et passation des épreuves : deux objectifs contradictoires …

Comme prévu, les sujets seront choisis par le proviseur dans une banque nationale de sujets non modifiables sur proposition des équipes pédagogiques. Banque nationale ouverte à partir du 1er décembre pour la première série d’épreuves, et à partir du 1er mars pour la seconde série d’épreuves. Disponible également pour les élèves ? Mystère …

L’établissement choisit entre un même sujet à la même date et à la même heure ou des sujets différents selon les classes. Le texte indique que : « dans la mesure du possible la composition sur le même sujet à la même date doit être privilégiée ». Effectivement, on peut penser que cela permettra de valoriser, aux yeux des élèves et de leurs parents, l’épreuve en question. Malheureusement, le même texte indique que les épreuves se passent : « en principe, sans banalisation des créneaux pour les autres élèves de l’établissement ». Contradiction, d’autant plus qu’il faudra compter avec les aménagements d’épreuves (tiers temps, etc.), qui ne sont pas précisés pour l’instant.

Le texte met fin à la salle en « format examen », prévoit un seul surveillant par salle et indique que «  la salle de classe en configuration habituelle suffira. » C’est logique si l’on veut déranger le moins possible l’organisation de l’établissement, mais quand on connaît la surpopulation actuelle des salles de classe, on ne peut pas dire que les candidats y seront à l’aise !

Comment seront corrigées les copies ?

La correction sera assurée par des professeurs du lycée qui corrigeront les élèves des collègues. Les sujets comporteront des éléments de barème mais pas de corrigés. Les copies seront numérisées et les corrections se feront en ligne, ce qui risque de rebuter certains collègues.

Les lycées de l’académie de Strasbourg ont reçu la semaine dernière l’appareil permettant de numériser rapidement les copies, ce qui permettrait de gagner du temps sur l’anonymisation. Efficace ? Ce sera à mesurer ! De façon générale, l’organisation de ces épreuves peut être vue comme un transfert de charge partiel vers les établissements.

L’harmonisation des notes se fera a posteriori, dans des commissions académiques, une fois par trimestre d’évaluation. Pour, dit le texte, « corriger un éventuel effet « correcteur » ou « établissement », ces commissions pourront modifier les notes. Les élèves pourront accéder à leurs copies corrigées après cette harmonisation et éventuellement faire un recours auprès de la rectrice.

Les questions qui fâchent ne sont pas réglées

Quel délai de correction ?

E3C

Ce point, pourtant crucial, n’apparaît pas clairement dans le texte, mais nous relevons à la fois du flou et des motifs d’inquiétude.

Selon le ministère, il est « souhaitable que les épreuves ne débutent pas avant le 20 janvier 2020 » pour la première session. La correction des copies doit être achevée « deux ou trois jours [avant] la date de la commission d’harmonisation académique ». Cette commission devra se réunir au plus tard le 13 mars 2020. D’après les informations imprécises que nous avons du rectorat, la remontée des notes serait fixée, pour la première vague d’E3C, au retour des congés d’hiver, soit le 2 mars pour l’académie de Strasbourg.

Pour la seconde vague, la date limite des commissions est fixée par le ministère au vendredi 12 juin 2020. Le rectorat a évoquée une remontée des notes pour le 10 juin.

Quelles que soient les contraintes calendaires, le Sgen-CFDT revendique que le temps de correction ne soit pas réduit à peau de chagrin et sera particulièrement vigilant sur ce point. Il faut en effet rappeler que la charge de correction sera lourde : corriger des copies d’examen (certes, moins riches que les copies de terminales actuelles), en même temps faire cours comme d’habitude, donc continuer à travailler les nouveaux programmes, tout en coordonnant cette charge avec les bacs blancs des actuels élèves de terminale !

Et la seconde session précédera de très peu les épreuves écrites du baccalauréat en terminale, sans compter les épreuves orales de langues vivantes au mois de mai.

Au-delà, ces épreuves nécessitent des temps de concertation, non seulement pour choisir le ou les sujets, mais aussi pour se répartir les copies entre collègues, pour discuter des critères des barèmes, puis des temps de correction après les épreuves, d’harmonisation des notes entre équipes sans parler des épreuves de rattrapage…

Et comment tout ce travail sera-t-il rémunéré ?

Question visiblement incongrue puisque le texte n’en souffle mot … Pour le Sgen-CFDT, ces périodes ne pourront donc pas être simplement substituées aux cours ordinaires et devront être reconnues en décharge horaire et/ou en indemnité. L’absence de perspective claire sur ce point est incompréhensible à cette date de l’année .

En savoir plus :

L’analyse de la fédération des Sgen-CFDT

Le tract national à diffuser partout

Evaluation de l’EPS au bac : organisation du CCF et référentiel nationa

Parcoursup : bilan et perspectives