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Des annonces autoritaires qui ne tiennent pas compte des personnels
Après des mois de tergiversations, les mesures de la réforme ont enfin été rendues publiques par le Président de la République le 4 mai. Ces annonces ne tiennent pas compte des mobilisations unitaires historiques de l’automne qui ont démontré le refus et la colère des personnels face à son projet. Elles risquent de fragiliser les conditions de travail, et même d’emploi de nombreux personnels de lycées pro.
Pour le Sgen-CFDT Paris, trop de lignes rouges ont été franchies tant sur la méthode que sur le fond.
La méthode :
Concernant la méthode, cette réforme devait être progressive. La deuxième séquence de dialogue social a été tronquée et a révélé la pression exercée par le Président de la République sur un ministère de tutelle qui a perdu tous ses arbitrages. Le ministère et les services ministériels ont été dans l’incapacité d’exploiter les 200 propositions sorties des trois premiers mois de concertation. Au bout du bout, il n’aura été retenu que les solutions énoncées par le Président de la République lors de sa campagne présidentielle. Alors qu’en s’engageant dans les discussions, le Sgen-CFDT a joué son rôle d’acteur social responsable et qu’un grand nombre des propositions de notre syndicat figuraient dans la synthèse des groupes de travail, l’exécutif est coupable d’avoir organisé un simulacre de dialogue social sous couvert de démocratie participative, décrédibilisant par la même le travail de son ministère de tutelle. Force est de constater que les déclarations du ministère précisant que le lycée professionnel ne peut répondre aux besoins des entreprises à court terme ont été balayées par la volonté du Président de la République de répondre aux demandes des entreprises, sans tenir compte des réalités de terrain. Ces pratiques, pour le moins inquiétantes, montrent le peu de considération que l’exécutif accorde aux partenaires sociaux et dénotent un fonctionnement davantage autocratique que démocratique de notre gouvernement.
Avant de parler du fond de cette réforme, nous rappellerons, que le lycée professionnel est un lieu d’exercice particulier qui répond à des exigences sociales et éducatives très importantes. Il concentre les élèves les plus fragiles socialement et scolairement avec uniquement « 3% d’enfants de cadre et 40% des élèves en situation de handicap scolarisés dans la voie pro, contre 6% en voie générale et technologique ».
Le fond :
Les Périodes de Formation en Milieu Professionnel (PFMP)
L’idée d’augmenter les PFMP, qui avait été écartée car rejetée par l’ensemble des acteurs de la formation professionnelle, revient en force. En effet, dès 2024, il est envisagé en terminale, de moduler les PFMP en fonction du parcours Les élèves ayant opté pour le module « insertion professionnelle » effectueront 12 semaines de stage dont la majorité après le passage des examens en mars. La désorganisation de l’année de terminale est dans les tuyaux alors qu’elle ne relève pas d’une demande des personnels et n’a jamais été discutée avec les organisations syndicales. Le risque de faire bondir le taux d’absentéisme chez nos élèves est bien réel.
Concernant cette mesure sur la modularité des PFMP en terminale, plusieurs risques majeurs apparaissent :
– Une pression certificative accentuée sur l’année de terminale avec des examens terminaux plus tôt dans l’année ;
– Une sur sollicitation des entreprises et des stages au rabais. Les départs massifs en entreprise des élèves de terminale au même moment, sans prise en compte des spécificités des filières professionnelles, pose question ;
– Un risque de décrochage scolaire après les 6 semaines de PFMP obligatoires pour les élèves qui n’ont pas vocation à s’insérer ;
– Une formation raccourcie si le stage de fin d’année ne s’inscrit pas dans le prolongement de la formation ;
– La gratification qui risque d’inciter nos élèves à choisir massivement la PFMP supplémentaire au détriment de la préparation d’une poursuite d’études.
La gratification :
Financée par de l’argent public, elle s’appliquera en septembre 2023 avec beaucoup de questions sans réponse. Elle sera différente suivant le niveau et l’année de formation.
La carte des formations :
Les acteurs et les critères qui élaborent la carte des formations vont être réformés. Dorénavant, celle-ci devra répondre aux besoins des entreprises locales. Les formations qui ne débouchent pas sur une insertion professionnelle immédiate seront fermées. Les lycées professionnels ont aussi vocation à permettre aux jeunes de poursuivre des études. L’intersyndicale voie pro refuse cette vision qui réduit l’enseignement sous statut scolaire à la seule employabilité immédiate.
Toujours au chapitre de la carte des formations, nous sommes d’accord sur le fait qu’elle doit évoluer pour permettre une meilleure insertion de nos élèves. Pour autant, annoncer, autant de fermetures et d’ouvertures de sections sur un an, sans expliquer comment et avec quels moyens les enseignants pourront se former et se reconvertir est pour le moins irresponsable. Chez nos collègues, l’émoi a fait place à la colère. Une telle ambition demande du temps et des moyens et au delà des effets d’annonce, cela doit s’accompagner de la présentation de modalités de mise en œuvre permettant aux enseignants de se former et surtout de se projeter. Au lieu de cela, un plan brutal de reconversions forcées est annoncé pour les collègues des filières tertiaires.
La lutte contre le décrochage scolaire ne peut se résumer à la mise en place de la demi-journée de « découverte des métiers » au collège et à des cours de soutien sur les savoirs fondamentaux et encore moins à des mesures d’accompagnement vers l’emploi liées au pacte.
La version du pacte pour les PLP propose des missions complémentaires directement liées à la réforme et son objectif de renforcer les liens école/entreprise. Le « travailler plus pour gagner plus » ne peut pas constituer une solution pour remédier au décrochage salarial. De plus, ce pacte va inéluctablement renforcer les inégalités salariales entre les femmes et les hommes alors que l’égalité est brandie comme une grande cause nationale.
L’ensemble des annonces du Président de la République vont désorganiser les lycées et risquent de fragiliser les conditions de travail, et même d’emploi de nombreux personnels des lycées professionnels.
Un projet à combattre à tous les niveaux !
L’intersyndicale voie pro porte l’exigence d’un renforcement du service public d’éducation dans son ensemble. Elle rappelle tant au Président qu’à la Ministre que, s’ils persistent à vouloir imposer leur projet, elle prendra ses responsabilités pour le combattre.
L’intersyndicale voie pro, CGT Éduc’action, FSU, SE-UNSA, SGEN-CFDT, SNALC, SUD Éducation, FTE-CNT, appelle les collègues à se réunir dans les établissements pour échanger sur ce projet de réforme et envisager ensemble les moyens pour empêcher ce projet. L’intersyndicale appelle les personnels à se mobiliser par la grève et dans les manifestions le 6 juin en rendant visible notre opposition à ce projet de réforme.