Le point sur le projet de loi « Ecole de la confiance »

L'analyse et les questionnements du Sgen-CFDT concernant cette loi, adoptée par l'Assemblée Nationale le 19 février dernier.

Au départ, il ne devait pas y avoir de loi. Puis il y a eu le projet de loi pour une école de la confiance et ses multiples amendements. La loi Blanquer est devenue une loi fourre-tout qui a tout de même été votée en première lecture à l’Assemblée.

Le texte de Loi n’est pas passé devant le Sénat, ni en seconde lecture devant la Chambre. Il n’a pas encore de décrets d’application ni d’arrêtés et de circulaires sans lesquels la loi Blanquer est inapplicable. Pourtant ce texte pourrait rapidement entrer en vigueur car il n’est pas certain qu’il soit modifié en profondeur lors de la 2ème lecture.

Voici notre analyse de ce projet de loi:

 

TITRE IER GARANTIR LES SAVOIRS FONDAMENTAUX POUR TOUS

 

Chapitre Ier L’engagement de la communauté éducative

Article 1

Le droit de réserve :

L’article 1 sur le devoir de réserve ne change rien par rapport à ce qui est actuellement en vigueur.

Article déjà rejeté par le Conseil d’Etat car non conforme au statut des fonctionnaires : le devoir de réserve est et restera fondé sur la jurisprudence existante.

La présence des symboles dans les classes :

Concernant les drapeaux, Marseillaise… et carte de France au fond de la classe. Un mesure qui a un coût, mais pour quelle efficacité ? Depuis quand l’exposition à des symboles assure-t-elle la compréhension, l’intégration des valeurs et principes dont ils sont une représentation matérielle ?

Harcèlement:

Assurer une meilleure protection des élèves victimes de harcèlement est bien sûr une priorité mais doit être accompagnée d’une formation initiale et continue spécifique.

Formules:

Sur la formulation parent 1 et parent 2. Pourquoi ne pas utiliser Parent : père – mère – représentant.e  légal.e ?

 

Chapitre II L’extension de l’instruction obligatoire aux plus jeunes

Article 2

L’instruction est obligatoire pour chaque enfant dès l’âge de trois ans et jusqu’à l’âge de seize ans.

Les ATSEM des écoles privées seront financées par les mairies. Cette nouvelle charge pour les communes sera-t-elle compensée par l’Etat comme annoncé ? Jusqu’à quand ? Cette charge sera-t-elle prise sur l’enveloppe consacrée aux écoles publiques ?

Article 3 

L’idée de stages communs entre enseignants et ATSEM semble utile dans le respect de chaque statut.

Article 4

Moyens financiers

L’aide proposée couvrira-telle la totalité des dépenses ? Que deviendra le montant dans le temps ?

Dérogations

Cette dérogation aurait pu être évitée si la mise en place n’était pas précipitée. Il n’y avait aucune urgence à mettre en place l’obligation scolaire à la rentrée 2019, alors que 97% des 3 ans fréquentent déjà, l’école, en métropole. Une action, ciblée à partir de 2019, sur les territoires d’outre-mer où le taux de scolarisation est bien inférieur n’aurait-il pas été plus judicieux ?

 

Chapitre III Le renforcement du contrôle de l’instruction dispensée dans la famille

Article 5

Le contrôle du suivi des apprentissages pour l’école à la maison est à renforcer. Les compétences civiques et sociales pour vivre dans une République laïque devraient être particulièrement surveillées. Ces enfants devraient être évalués annuellement avec un dispositif national dédié assuré par l’IEN et son équipe. La charge de travail des IEN relative à cet article n’est pas évaluée.

 

Chapitre IV Le renforcement de l’école inclusive

Article 5

Les conditions de mise en place des Pôles Inclusifs d’Accompagnement Localisés (PIAL) doivent être regardées avec attention notamment en qui concerne les AESH. Pour une réelle réussite de l’inclusion une formation, initiale et continue, dédié est demandée.

 LES REVENDICATIONS DU SGEN-CFDT POUR L’ÉDUCATION INCLUSIVE :

  • Reconnaître toutes les tâches liées à l’école inclusive pour tous les personnels,
  • Assurer l’accompagnement des personnels et des élèves par des professionnels spécialisés,
  • Assurer un accompagnement des élèves par les AESH et par les AED (assistants d’éducation) en nombre suffisant,
  • Proposer de véritables contrats de travail à temps plein pour les accompagnants,
  • Offrir une formation adaptée à la prise en charge des élèves en situation de handicap ou à besoins particuliers pour tous les personnels,
  • Dégager du temps de travail pour la concertation en équipe autour de la mise en œuvre de l’accueil des élèves à besoins particuliers.

 

TITRE II INNOVER POUR S’ADAPTER AUX BESOINS DES TERRITOIRES

 

Chapitre Ier L’enrichissement de l’offre de formation et l’adaptation des structures administratives aux réalités locales

Article 6

Les établissements publics locaux d’enseignement international

La mixité sociale de ces établissements doit être une obligation pour risque de ghettoïsation de classes. Les moyens accordés à ces établissements ne doivent pas être au détriment des autres y compris en langue.

Les établissements publics locaux d’enseignement des savoirs fondamentaux

La création d’établissements publics des savoirs fondamentaux ne se fera localement qu’avec l’accord des DASEN et  des collectivités et en fonction des besoins.

Nous dénonçons l’absence totale de concertation, d’avis préalable des équipes des écoles, des collèges et des parents !

Dans un premier temps, cela ne se fera sans doute que très localement dans le cadre d’expérimentations particulières. Ce qui peut aussi entraîner une rupture d’égalité sur le territoire. Le ministère ne sera-t-il pas tenté de privilégier (en moyens humains par exemple) ce type d’établissement au détriment de ceux existants ?

Le Sgen-CFDT réfléchit depuis plusieurs années à un établissement du 1er degré.

Nous ne voulons pas d’un principal de collège, chef de plusieurs écoles. Cependant, nous réfléchissons depuis longtemps à un réel statut d’une école du premier degré.

Chapitre III L’évaluation au service de la communauté éducative

Article 9

La création du CEE (comprenant 14 membres dont 10 nommés par le gouvernement !) sonne la disparition du Cnesco. Pour le Sgen CFDT, il est important que l’évaluation soit « indépendante, scientifique et participative du système scolaire ».

Le CNESCO dispose d’une expertise reconnue en matière d’évaluation des politiques publiques d’éducation alors qu’il n’est pas encore parvenu au terme de son premier mandat qui court jusqu’en 2020. Les acteurs de terrain ont besoin de stabilité institutionnelle, la confiance qu’a su créer le CNESCO auprès de la communauté éducative et de la communauté scientifique s’est construite au fil des années. C’est pourquoi il devrait voir ses missions affirmées et éventuellement élargies. 

 

TITRE III AMÉLIORER LA GESTION DES RESSOURCES HUMAINES

 

Chapitre IER Les instituts nationaux supérieurs du professorat et de l’éducation

Article 12

Pourquoi une telle précipitation ?  La formation initiale est trop importante pour être totalement modifiée dans l’urgence. Construire une nouvelle formation initiale doit être concertée et réfléchie si l’on veut qu’elle soit efficace et utile.

 

Chapitre II Les personnels au service de la mission éducative

Article 13

Assurer une visite médicale à tous les personnels est une demande des agents. Elle nécessite des moyens la généralisation de la visite médicale sur le temps de travail, et doit devenir une réalité.

Article 14

Le recrutement de contractuels non formés pour enseigner devant les élèves n’est pas concevable. Il s’agit dans cet article de permettre à des AED d’être recrutés spécifiquement en pré-professionnalisation. Dans ce cadre, ils seraient appelés à prendre ponctuellement des élèves en charge tout en bénéficiant dans le cadre de leurs missions d’une formation.

Le Sgen-CFDT va porter dans les concertations à venir des revendications très précises pour garantir à l’étudiant un parcours de formation réellement préprofessionnalisant.

Dans le premier degré, le Sgen-CFDT est opposé au recours aux contractuels.

Article 16

C’est un grand pas en faveur des usagers et une réelle reconnaissance de l’utilité des médecins de l’Éducation nationale dans le système de santé.

 

Pour une véritable école de la confiance

Avec l’ensemble des organisations franciliennes, le Sgen-CFDT a demandé aux députés de ne pas voter cette loi.

Le texte, voté par 353 voix contre 171 et 31 abstentions, a eu le soutien des élus LREM-MoDem et une partie des UDI-Agir, les autres groupes votant majoritairement contre.

Le Sgen-CFDT a été reçu par la Commission des affaires culturelles et scolaires du Sénat, mardi 19 février, à trois reprises (second degré, premier degré et personnel de direction).

le Sgen-CFDT a pu tout d’abord exprimer son mécontentement sur la méthode utilisée pour construire ce projet de Loi : manque de transparence, absence de dialogue social, ajout d’amendements deux jours avant l’examen de la Loi par l’Assemblée.

De la part du Ministère, c’est s’asseoir sur l’agenda social 2019 qui avait fait notamment de la direction d’école un sujet de négociations.