Déclaration liminaire au CSAMEN du 7 novembre 2023
Le 13 octobre dernier, l’École a été visée par le terrorisme islamiste, que nous ne confondons pas avec l’Islam.
A Arras, de nouveau, un enseignant, un collègue, Dominique Bernard a été tué par un fanatisé. Son assassinat ravive la mémoire de l’assassinat, il y a trois ans, de Samuel Paty.
La blessure pour l’ensemble de la communauté éducative ne se referme pas, nous n’oublions pas.
Le Sgen-CFDT adresse de nouveau ses condoléances à la famille, aux proches, aux collègues de Dominique Bernard et de Samuel Paty. Nous pensons à nos collègues blessé·e·s et éprouvé·e·s à Arras.
Nous continuons toutes et tous de faire École, d’accueillir tous les élèves pour leur permettre de s’émanciper, de construire leur avenir par l’acquisition de connaissances, de compétences, de la culture, dans un cadre collectif qui les amène à rencontrer l’altérité, à grandir avec et par elle.
Depuis l’attaque d’Arras, le ministre a convié les organisations syndicales pour envisager les manières d’améliorer la sécurisation des établissements et la protection des personnels.
La démarche du dialogue est évidemment celle qu’il faut emprunter pour avancer sur un dossier complexe, délicat, en se gardant des amalgames et des effets de manche et de communication afin de construire des mesures utiles pour la protection des personnels et des élèves.
Il conviendra de trouver aussi le cadre pour structurer ce dialogue dans la durée au niveau local et au niveau national pour suivre la mise en œuvre dans la durée des décisions prises.
Cette attaque tragique a bouleversé notre société, et a fortiori les communautés éducatives qui sont durement éprouvées. Dans ce contexte, pour le Sgen-CFDT, il fallait accepter de reprogrammer des chantiers lancés par le ministre afin de permettre aux personnels de faire face, de ne pas les pousser à faire comme si rien ne s’était passé.
Nous dénonçons le refus de penser les temporalités, qui a amené le ministère à transmettre des consignes aux personnels à la veille des congés, et pendant les congés, pour une mise en œuvre quasi immédiate, niant de fait la possibilité de prendre de réels congés, niant aussi de fait la capacité à bien conduire par exemple la démarche de prévention et de détection du harcèlement scolaire, et ce malgré nos nombreuses alertes.
La mise en tension permanente de l’ensemble des personnels sur tous les sujets ne fait que dégrader les conditions de travail, aggraver la perte de sens au travail.
La semaine dernière, le Sénat, à l’initiative d’un sénateur d’extrême-droite a été le lieu d’un odieux colloque dont les participants et participantes se sont réjoui·e·s de parvenir à intimider des enseignantes et enseignants, à les conduire à l’autocensure en particulier sur les questions d’éducation à l’égalité filles-garçons, à la non-discrimination et d’éducation à la sexualité et à la vie affective.
Se réjouir d’une capacité à porter atteinte à la laïcité des enseignements, à porter atteinte donc à l’École est inacceptable. L’an dernier, plusieurs organisations syndicales avaient alerté le ministre sur les menaces de l’extrême-droite sur l’École.
Il convient de protéger l’École, ses personnels, les élèves de ces intimidations, de ces stratégies de désinformations massives sur notre action éducative, parfois de menaces de violence.
Nous attendons des paroles et des actions résolues contre les contestations de notre action éducative, nous avons signalé par exemple des distributions de tracts aux abords d’établissements scolaires appelant les parents d’élèves à contester les enseignements dispensés, en particulier l’éducation à la sexualité et à la vie affective.
Pour le Sgen-CFDT, ces actions tombent sous le coup de plusieurs dispositions du code de l’Éducation visant à garantir la laïcité des enseignements.
Ce comité social sera en grande partie consacré à l’examen des lignes directrices de gestion relatives aux carrières des personnels du ministère. Nous aurons à débattre de nombreux amendements, nous n’allons pas tous les évoquer ici. Cependant nous voulons dès maintenant mettre en évidence deux sujets majeurs.
Tout d’abord, l’évolution des modalités d’accès à la classe exceptionnelle.
La dé-fonctionnalisation de la classe exceptionnelle est une remise en cause du protocole PPCR qui se fixait comme objectif de mieux reconnaître l’engagement des fonctionnaires en améliorant leurs perspectives de carrière.
Qui plus est, vous la dénaturez et vous changez les règles de promotion et les perspectives de carrière sans aucune mesure transitoire pour les agents éligibles à la classe exceptionnelle qui sont plutôt en milieu de carrière voire en fin de carrière.
Nous demandons le maintien de la promouvabilité des agents éligibles jusqu’à cette année, et même de celles et ceux qui seront sorti·e·s de la plage d’appel avec les nouvelles dispositions, celles et ceux qui sont aux échelons 3 et 4 de la hors classe ! (Nous avions déposé un amendement en ce sens).
L’absence de mesures transitoires garantissant leur promouvabilité est inacceptable (certain·e·s ont pu renoncer à la liste d’aptitude des agrégé·e·s en se disant qu’il y avait la perspective d’accéder plutôt à la classe exceptionnelle).
La classe exceptionnelle devait permettre la reconnaissance de l’investissement professionnel dans des fonctions particulières, liste qui avait été établie dans un cadre paritaire et qui offrait donc des critères objectifs d’accès à la promotion de grade.
Rien de tel dans la nouvelle classe exceptionnelle proposée par le ministère. C’est une formidable régression, vers des évaluations de la valeur professionnelle, encore plus arbitraires et discriminantes, qui favoriseront certain·e·s et pénaliseront d’autres selon la vision de l’évaluateur·trice.
Dans ces conditions, nous demandons la suppression de la classe exceptionnelle et la redéfinition de la hors classe avec l’ajout d’échelons supplémentaires pour parvenir à un échelon sommital correspondant à celui de la classe exceptionnelle. Cela donnerait des perspectives de carrière aux collègues en fin de carrière.
Si cette classe exceptionnelle était maintenue, nous demandons l’établissement d’un barème assis sur des critères objectifs pour apprécier la valeur professionnelle.
Quelles activités professionnelles permettront d’évaluer l’implication en faveur de la réussite des élèves, l’engagement dans la vie de l’établissement, la richesse et la diversité du parcours professionnel ? La stabilité d’un·e enseignant·e dans un établissement sera-t-elle pénalisée ? L’investissement d’un·e enseignant·e dans sa classe et non dans un dispositif externalisé sera-t-il bien reconnu ? La participation aux instances de l’établissement ou de l’école et aux réunions pédagogiques permettra-t-elle de reconnaître l’engagement dans la vie de l’établissement ?
La prise en compte des fonctions et des missions doit être maintenue et complété par des activités professionnelles.
L’engagement professionnel des enseignant·e·s au quotidien est tel, les études le montrent, que la classe exceptionnelle doit devenir un grade accessible à toutes et tous, basé sur l’ancienneté. Par ailleurs, un certain nombre de fonctions que devait reconnaître la classe exceptionnelle devront être revalorisées significativement.
Ensuite, le droit à la retraite progressive.
Pour le Sgen-CFDT, ce droit nouveau doit devenir effectif pour les agents, quel que soit leur métier. Nous revendiquons depuis longtemps des aménagements de fin de carrière.
Le droit à retraite progressive est un aménagement possible, trop tardif selon nous, mais c’est une ouverture. Cependant, pour que cette ouverture soit réelle, cela suppose que le temps partiel soit accordé de droit à partir de 62 ans. Sans cette mesure, le droit à retraite progressive risque de rester théorique pour de nombreux collègues. Ce serait une nouvelle fois une déception forte pour les agents.